Lorsque le sexe dans le couple est finalement traduit comme devoir, il se vide quelque part de son sens et fait place au mal-être, à l’atteinte de la dignité humaine.
Nous parlons ici des femmes, car elles sont souvent les plus concernées par « ce devoir »,
Des femmes sont nombreuses à vivre chaque jour ce qu’il conviendrait parfois d’appeler violence ou corvée sexuelle.
La sexualité dans le couple devrait contribuer à l’épanouissement et au bien-être de chacun des partenaires/conjoints, que ce soit par le plaisir qu’elle procure, que par le partage qu’elle donne de vivre à deux. La sexualité est un espace de rencontre de soi avec soi pour se découvrir, aimer son corps (cela fait énormément du bien) et s’aimer, et également une occasion d’approfondir les liens à deux, de s’aimer plus particulièrement et pourquoi pas plus profondément. Si le plaisir et le bénéfice sexuels peuvent être individuels, dans le contexte de couple, la sexualité n’a tout son sens que lorsqu’elle dépasse la dimension égoïste et épouse l’échange, le consentement et le respect des différences.
Très souvent, la place que l’homme s’offre et celle que la société lui confère en termes de rôles de genre l’amènent à disposer du corps de la femme, de ne pas tenir compte de son désir, de son plaisir, de son refus, de ses besoins en matière sexuelle au sens large, des particularités qui relèvent de sa sexualité beaucoup plus complexe.
Les hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus n’est-ce-pas ? C’est dire que les hommes sont souvent amenés à céder à leurs instincts sexuels sans tenir compte de l’autre, de la femme, de ce qui caractérise fondamentalement sa sexualité. Or le désir sexuel féminin est un phénomène assez complexe ; il ne répond pas aussi automatiquement comme chez l’homme chez qui le taux de production d’hormones sexuelles est très élevé et constant. Il est donc plus réactif au stimulus et plus rapidement disposé à dégainer l’épée.
En outre, l’homme a une sexualité beaucoup plus visuelle, centrée sur le sexe, et donc pulsionnelle, alors que la sexualité de la femme est plus émotionnelle, plus affectueuse.
Le désir sexuel féminin a donc souvent besoin de plus du temps et de certaines conditions particulières pour s’établir. Le climat émotif et le contexte affectif ainsi que l’environnement comptent beaucoup dans le mécanisme du désir sexuel féminin.
Ces particularités sont souvent ignorées dans la vie sexuelle des couples ; ce qui impacte très négativement l’épanouissement des femmes aussi bien sur le plan sexuel que dans d’autres domaines de la vie. Les femmes sont victimes aussi bien de l’ignorance des hommes sur le fonctionnement sexuel féminin que de la tradition, ou même de la mentalité selon laquelle « le sexe de la femme est une propriété privée de l’homme dont il a le droit de se servir au premier besoin »
Les séquelles sont parfois lourdes à porter pour elles, mais aussi pour le couple. Nous le voyons bien ; une femme qui cède habituellement à la dictature du désir sexuel de son mari, à sa pulsion à l’état de nature, subit et ressent un acte de violence que l’idée de devoir conjugal et la peur d’être mal comprise l’empêchent d’arrêter ou de dénoncer.
Un rapport sexuel dans de telles conditions expose la femme à des problèmes de santé d’ordre physique (blessures pour faute de lubrification, MST et VIH-SIDA …) et psychique (traumatisme, dégoût chronique, dyspareunie superficielle…) et est contraire à la dignité.
Des rapports subis sans désir ni plaisir peuvent fragiliser une relation. Car il n’est plus qu’un secret de polichinelle que beaucoup de couples se sont séparés à cause de la dégradation de leur sexualité dû à l’expression sexuelle trop pulsionnelle et dominatrice de l’homme.
En matière sexuelle, le consentement de la femme est très important et mérite d’être pris en compte par le conjoint pour une sexualité épanouie pour chacun et une relation de couple harmonieuse.
Par Jean-Baptiste LINSOUSSI
Sexologue clinicien et thérapeute de couple
